The Euro-Mediterranean Institute for Inter-Civilization Dialog (EMID) proposes to promote cultural and religious dialogue between Mediterranean civilisations ; to establish a network of specialists in inter-Mediterranean dialogue ; to encourage Euro-Mediterranean creativity ; to encourage exchange between Mediterranean societies ; to work to achieve Mediterranean conviviality ; to advise charitable organisations working around the Mediterranean and provide the support necessary to achieve their original projects.
ALBUM DU MONDE : DANS L’ENCOIGNURE DU MONDE


« Tu veux prendre à droite, tu ne le peux ; à gauche, tu ne le peux ; retourner en arrière, tu ne le peux. Il est trop tôt ou trop tard. La terre est saturée d’humanité, il n’est plus de place pour la divinité. Tout ce chahut m’empêche d’accéder au sanctuaire, situé dans l’oubli et l’absence, où m’attend le trône. C'est le démon qui talonne ces malheureux, les presse, les pousse, les accule à leur mort. N’entendent-ils pas Abd el-Qader les rabrouer : « Tu es un aveugle conduit par un aveugle qui te ressemble » ? En définitive, ce ne seraient qu'autant de silhouettes. Je ne les aime ni ne les déteste. Je ne m'encombre pas même de les revêtir de chair, de les investir de passions. Derrière leur visage, sur les cordes de leurs nerfs, s’accumule leur linge sale. Il dégage de tels relents qu’ils caricaturent leurs traits. Seuls ceux qui ont cultivé un chemin intérieur peuvent encore s’arracher à l'ornière de leur vie et accomplir le saut au-dessus de l’abîme. Un jour, ils abattront leur dernier masque et livreront leurs camisoles en pâture aux vers. Bouderbala choisit entre la moisissure humaine et l’imperturbabilité divine. Pour l’éternité, pour un instant, pour une parole. Sa divinité est de curiosité, de méditation, de dispersion, de dissociation. »
Je ne sais pas qui est cet homme, nul ne le saurait. Parce qu’il serait de ces Bouderbalas qui hantent la cité en veilleurs de leur solitude, en disséminateurs de leur silence, en vigiles du vent. Il ne se cache pas, il n’a rien à cacher, il se dérobe à l’humanité. Il s’est perdu en soi, il n’a ni passé ni avenir, il est sur le qui-vive de l’instant. Il ne se décide pas à sortir du labyrinthe de la médina, à accomplir le pas qui le plongerait dans la cohue touristique de la casbah, retenu par sa rumination intérieure. Ce Bouderbala est là depuis ma naissance, il ne quittera son coin qu’à mon décès. C’est encore le dernier survivant de ma berceuse. Il ne parlait pas, il n’écrivait pas, il n’invectivait pas, il ne tendait pas la main. Il n’était personne dans le chassé-croisé des passants. Son silence trahissait une romance que des orteils de chamelle ne cessaient de ruiner.
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