The Euro-Mediterranean Institute for Inter-Civilization Dialog (EMID) proposes to promote cultural and religious dialogue between Mediterranean civilisations ; to establish a network of specialists in inter-Mediterranean dialogue ; to encourage Euro-Mediterranean creativity ; to encourage exchange between Mediterranean societies ; to work to achieve Mediterranean conviviality ; to advise charitable organisations working around the Mediterranean and provide the support necessary to achieve their original projects.
BILLET D’AILLEURS : LE RAT DES MEDIAS


Je savais les télés en perte de vitesse, les émissions de téléréalité de plus en plus lassantes, les informations de plus en plus répétitives et accablantes, je n’imaginais pas qu’on tomberait si bas et inviterait des intellectuels à se crêper le chignon sur les plateaux. Cela marcha le temps qu’on réalise qu’ils étaient aussi nus que les politiciens, que leurs envolées les ridiculisaient plus qu’elles redoraient leur blason que et leurs citations les accoutraient de piteux haillons littéraires. Les producteurs ne cédèrent pas pour autant et proposèrent – en guise de dernier cri ! – d’inclure un rat dans la composition des panels. Comme on avait compris depuis longtemps dans les laboratoires robotiques de l’empire du Milieu qu’il serait plus coûteux, aventureux et aléatoire d’inventer des robots que de transformer des rats, voire des hommes (des volontaires bien sûr et contre des indemnités matérielles et symboliques dont le dédoublement gratuit de leur QI au moins), on convertissait des rats en robots. On commença donc avec un vrai rat d’égout dans le cerveau duquel on avait greffé toutes sortes de puces nano-technologiques qui lui garantissaient une mémoire phénoménale équivalant à cent millions de volumes, lui permettaient de suivre les débats sur le plateau télévisé et, grâce à un algorithme particulièrement prophétique, d’en prédire la tournure, les esclandres et les débouchés. De plus, comme il était relié à l’ordinateur sur lequel la Bibliothèque nationale de Chine avait digitalisé tous les livres répertoriés à ce jour, il reprenait les débatteurs humains sitôt qu’ils tronquaient une citation, l’imputaient à un mauvais auteur ou l’inventaient de toutes pièces. Le rat se contentait de couiner et il couinait si souvent que les débatteurs revinrent vite à de bonnes dispositions et ne citaient plus ni la Bible ni le Coran, ni Homère ni Shakespeare, ni Confucius ni Mao Tsé-Toung, ni les illustres inconnus ni les immortels tombés dans l’oubli. Et le malheureux rat ne couinant plus, les producteurs retournèrent stoïquement à des débats plus sereins où l’on ne discutait plus avec autant de virulence sur le voile, le viol et la violence (les thèmes les plus populaires) et où les débatteurs ne se cachaient plus derrière des citations. Mais l’audience baissa de nouveau, malgré la présence sur les plateaux de toutes sortes de hâbleurs, de râleuses, de hargneux et d’onctueuses, et l’on dut rameuter le rat auquel on avait ajouté une nouvelle fonctionnalité : il intervenait désormais dans les débats, s’exprimant par l’intermédiaire d’un ordinateur dont la voix rappelait celle du très regretté Stephen Hawking. Ses discours-fleuves, ses arguments, ses réparties montraient qu’il était programmé pour prendre systématiquement le contre-pied de toutes les positions des humains et il se révélait si cultivé, brillant et vicieux qu’il devint vite une attraction médiatique et ne s’attira rien moins que le titre de « rat divin » (on était dans l’année du rat). La chaîne qu’il servait battait tous les records d’audience depuis la légendaire époque des nouveau-philosophes qui n’avaient de nouveau que le travestissement de leur autocritique communiste en conversion taoïste. Bientôt toutes les chaînes s’assurèrent la collaboration d’un laboratoire de robotique murine et l’on en vint à proposer des débats intellectuels entre rats représentant des universités rivales qui n’incluaient pas d’autre homme que le présentateur et encore n’était-on pas sûr qu’il ne s’agissait pas d’un robot humanoïde ou d’un humain robotisé.
Cela se passait bien sûr en Chine où les débats intellectuels sont un divertissement populaire, où les expériences sur les rats et les humains ne sont pas contrôlées et où, dénués de tous sens de l’humour, on ne se souciait pas de l’absence de tout humour chez les rats.
Vu d’ailleurs, de loin, je l’avoue, c’est plutôt lourd…