The Euro-Mediterranean Institute for Inter-Civilization Dialog (EMID) proposes to promote cultural and religious dialogue between Mediterranean civilisations ; to establish a network of specialists in inter-Mediterranean dialogue ; to encourage Euro-Mediterranean creativity ; to encourage exchange between Mediterranean societies ; to work to achieve Mediterranean conviviality ; to advise charitable organisations working around the Mediterranean and provide the support necessary to achieve their original projects.
NOTE DE LECTURE : L. F. CELINE, VOYAGE AU BOUT DE LA NUIT (1932)


Céline assume le courage de sa peur. Son « Voyage au bout de la nuit » est nourri par la peur de mourir bêtement dans une guerre aberrante. Un témoignage travaillé par la rage, piétinant d'un chapitre à l'autre sans trop se répéter, dégoulinant de toutes les mauvaises passions qu'un homme pratiquant les lettres comme deuxième choix de carrière peut accumuler contre le succès de ses concurrents dans le commerce des lettres et contre l'aveuglement de la critique à son égard. Il crache sur les mots des autres en crachant les siens. Des chiures antisémites sous la plume exténuante d'une puce littéraire, tellement vaniteux qu'il ne se sent pas même tenu de terminer ses phrases. Ses points de suspension dénotent plus d'acharnement que de virtuosité. Peut-être trahissent-ils aussi des carences que nul ne comblera plus. On lui reprocherait d'écrire plus vite qu'on ne le lit. On a, avec ce hâbleur incorrigible et impénitent, la meilleure illustration de l'assimilation post mortem de la vanité au génie.
C’est un auteur cramoisi produisant des livres où se calcine son univers. Sa narration est calcinée. Ses phrases. Ses mots. Son désenchantement surtout. Il est tellement morbide qu'il ne sait pas entrouvrir un sourire dans son texte ; il broie tant de noir qu'on se sent interné dans son texte. Il barbouille ses lecteurs de ses déboires, de ses peines et de mots qu'il prend soin de racler ou de piéger avant de les leur balancer au visage. Dans un univers où l'ennui culmine dans le crime et la méchanceté qu’excite la guerre. C’est le porte-lettre d’une humanité pestilentielle où l'homme serait incurablement pleureur. Céline est tellement harassé par la littérature qu'il harasse ses lecteurs.
C’est l’un des écrivains français les plus talentueux et éloquents de l’entre-deux guerres. Sa gouaille le dispute à sa solitude. Il sort d'on ne sait quelle arrière-cour pour laver le linge sale qui s'est accumulé dans son âme et l'étendre sur des pages et des pages. Les démêlés entre des pantins humains pour lesquels le sens gît dans une mémoire éreintée sinon délabrée. Le tintement littéraire d'une domesticité creuse et sans vocation. Ce n'est ni un prolétaire ni un bourgeois, mais un excédé, plus râleur que raciste. Il aurait pu être nihiliste si seulement on le lui avait permis. Or on a tenté de l'entraîner, coûte que coûte, du côté de l'anarchie conséquente, c'est-à-dire totalitaire. Son mérite aura consisté à retourner vite à l'arrière-cour, n'attendant rien ni personne. Ce n’en est pas moins un artiste de la narration domestique, de ses personnages, de ses misères et de ses petitesses.