The Euro-Mediterranean Institute for Inter-Civilization Dialog (EMID) proposes to promote cultural and religious dialogue between Mediterranean civilisations ; to establish a network of specialists in inter-Mediterranean dialogue ; to encourage Euro-Mediterranean creativity ; to encourage exchange between Mediterranean societies ; to work to achieve Mediterranean conviviality ; to advise charitable organisations working around the Mediterranean and provide the support necessary to achieve their original projects.
SUR LES TRACES DE DIEU DANS LE BOUDDHISME : DE GOTAMA A METTEYYA


Gotama est né dans la petite république des Sakka (skt., Sakya) située entre l’Inde et le Népal. Dans la tradition du Mahayana, sa naissance en ce lieu lui valut le surnom de Sakyamuni, « le sage de Sakya ». Comme cette république était gouvernée par un conseil de notables dont l’un était le père de Gotama, la légende fit de lui le fils d’un roi. De nombreux récits sur sa vie courent les recueils des Sutta et du Vinaya qui forment le terreau où le bouddhisme puise ses enseignements. Le récit dominant raconte que « cent mille ères auparavant », Gotama était un ascète nommé Sumedha. Sous l’inspiration d’un Bouddha du passé du nom de Dinpakara, il résolut de devenir, lui aussi, un Bodhisatta : un être (satta) qui se consacre à réaliser l’illumination (bodhi) parfaite. Il s’incarna dans plusieurs vies, recueillant les enseignements de chacune et acquérant les vertus requises pour assumer la bouddhéité. Dans son avant-dernière vie, il vécut sous le ciel de Tusita, le monde des dieux Joyeux où attendrait son successeur et héritier Metteyya (skt. Maitreya) qui viendrait ravaler le bouddhisme oublié par l’humanité.
Les circonstances de la naissance de Bouddha restituent l’ambiance qui domine dans le bouddhisme. Sa mère, Mahamaya, rêvant qu’elle était transportée sur l’Himalaya sur un éléphant blanc, les interprètes brahmanes prédirent la naissance d’un maître universel, participant du monarque et de l’ascète – un cakkavatti ? Mahamaya se rendit chez sa famille pour donner naissance à l’enfant. En route, elle marqua une pause dans le jardin de Lumbini où elle succomba au parfum des roses et au chant des oiseaux et accoucha debout, accrochée à la branche d’un arbre sal. Plus tard, Gotama réalisa son illumination sous un arbre, donna son premier enseignement dans un parc et mourut entre deux arbres. Entre-temps, à seize ans, il se maria avec Yasodhara dont il eut un fils nommé Rahula. Ce serait après sa naissance que s’interrogeant sur les vertus et les aléas d’une vie domestique ordinaire, encombrée et dénuée d’intérêt, il répudia les vanités de sa jeunesse et partit à la recherche du « sans-naissance, sans-vieillesse, sans-décrépitude, sans-mort, sans-souffrance, sans-souillure, la libération de tout asservissement – le Nibbana ». Il se rasa les cheveux et la barbe, revêtit l’habit safran du moine et quitta sa maison pour une errance en quête de l’illumination. Le dieu compatissant Brahma-Sahampati l’exhorta à enseigner et il devint ainsi « le maître spirituel des dieux et des hommes ». Dans son premier sermon à ses compagnons, tenu du côté de Bénarès, il préconisa la « Voie du Milieu » entre les plaisirs des sens et les macérations ascétiques. Il donna encore ses Quatre Nobles Vérités : l’inhérence de la souffrance à l’existence ; l’entretien de la vie par la convoitise ; la liquidation de toute convoitise pour annihiler la vie et arrêter la souffrance ; la pratique de la Voie du Milieu pour parvenir à l’annihilation. Bientôt Gotama était entouré de soixante disciples qu’il chargea de répandre son enseignement.
Dans ses pérégrinations, Gotama s’exerça aux diverses méthodes de méditation : la méditation yogique consiste à pratiquer la concentration pour transcender la connaissance et accéder au vide où l’on vague dans l’inconscience ; la mortification ascétique consiste à exercer sa volonté pour neutraliser les sens ; la concentration sur le sillon tracé par un soc de charrue. Résistant aux sortilèges de Mara qui tentait de le ramener à une vie de désirs et de passions, de tracas et de tourments, il s’installa enfin sous un arbre pipala – qui deviendra l’Arbre de la Bodhi ou de l’Illumination. Une nuit, reconstituant le dessein qui se dégageait de son parcours de méditation, il distingua trois composantes : le ressouvenir des vies antérieures, la réincarnation selon le mérite (karma) de chacun, l’élimination des scories dont les désirs et les passions chargent l’esprit.
Les écoles et sous-écoles dans le bouddhisme sont si nombreuses qu’on se perd entre les différentes doctrines. Elles ne s’accorderaient que sur l’exclusion du plaisir sensuel que l’on considère mauvais de nature. La veine bouddhique la plus répandue et parlante serait celle du Mahayana qui désigne Bouddha sous le nom de Sakyamuni. Bouddha n’a pas atteint l’illumination en ce monde mais dans un passé antérieur, des millions d’ères avant celle-ci, et il n’a cessé depuis d’enseigner en ce monde et dans une multitude d’autres. C’est le même Bouddha céleste qui, à la limite, ne cesserait de paraître sur terre pour renouveler son enseignement sur le nirvana requérant les vertus cardinales du bouddhisme : Sakyamuni transcenderait toutes ses manifestations terrestres et accéderait au rang de… Dieu. Les Bouddhas (terrestres ?), le dernier (Gotama) ou le prochain (Metteya), ne sont pas tant importants comme personnages que comme restaurateurs du bouddhisme dans une chaîne de bouddhas qui mêlent leurs enseignements.
Contrairement aux personnages instigateurs des autres religions, Bouddha ne représente pas de menace politique puisqu’il renonce au pouvoir pour accéder au rang d’un maître universel. Moïse était soucieux de libérer son peuple, de lui donner une constitution divine et de le conduire à la Terre promise. Jésus se posait, explicitement ou implicitement, en Messie, représentant une menace pour les autorités en place, tant militaires romaines que rabbiniques pharisiennes et ecclésiastiques sadducéennes. Mahomet préconise l’expansion de l’Islam par l’épée et le Coran, posant la conquête du monde comme une condition au triomphe d’Allah. En revanche Bouddha s’écarte du politique et se consacre à irradier son illumination sur l’humanité.